Legendes De La Foret Viennoise – Deuxieme Version

Édition :

Sur une petite place dans un quartier de Vienne et dans la Forêt Viennoise, entre les deux guerres mondiales. Les hommes et les femmes qui vivent là chantent et boivent, s’aiment et se trompent, partagent leurs espoirs et leurs désillusions, se repoussent et parfois se pardonnent, pour le meilleur et pour le pire. Il y a Magiemag, le propriétaire d’une clinique de poupées, et sa fille Marianne, fiancée contre son gré à Oskar, son voisin boucher. Marianne est séduite par le bel Alfred, un jeune noble désargenté et bon-à-rien qui fréquentait auparavant chez la veuve Mathilde, la buraliste de la place, avant que celle-ci ne le remplace par Erich, le neveu de Magiemag. Le tout sous le regard goguenard du capitaine et de Havlitchek, l’assistant-boucher. Légendes de la Forêt Viennoise est, avec Casimir et Caroline, la pièce la plus célèbre de Horvath. Il en existe deux versions, assez différentes. La seconde que nous vous présentons ici, n’avait jamais été publiée auparavant en français. Elle est légèrement plus courte que la première version, mais surtout moins cruelle et avec une once d’espoir.

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Ödön von Horváth

Légendes

de la forêt

Viennoise

Première version

Pièce populaire en trois parties

(Geschichten aus dem Wiener Wald)

Nouvelle traduction française de
Henri Christophe

Editions du Brigadier
14, rue du Quai - 59800 Lille

Rien ne donne autant le sentiment de l’infini que la bêtise.

Personnages

Alfred

La mère

La grand-mère

Ferdinand Hierlinger

Valérie

Oskar

Ida

Havlitchek

Le capitaine

Une dame distinguée

Marianne

Magiemag

Deux tantes

Erich

Emma

Hélène

Une domestique

Une baronne

Un confesseur

Un gentleman

Un bonimenteur

La pièce se passe de nos jours à Vienne, dans la Forêt Viennoise et dans la Wachau.

Première Partie

1

Dans la Wachau.

Devant une maisonnette au pied d’un château fort en ruine. Alfred, installé en plein air, avale à belles dents du pain, du beurre et du lait caillé. Sa mère lui apporte une lame plus aiguisée.

L’air résonne de chants et de musique... comme si inlassablement, mourait la valse de Johann Strauss Légendes de la Forêt Viennoise.

Et à proximité, passe le beau Danube bleu.

La mère regarde Alfred manger. Elle lui attrape soudain la main qui tient encore le couteau et plonge son regard dans le sien.

Alfred s’interrompt net. La bouche pleine, il la dévisage avec méfiance.

Un silence.

La mère, lui passant lentement la main dans les cheveux. C’est gentil à toi, mon Alfred chéri... tu l’as pas complètement oubliée, ta mère, mon Alfred chéri —

Alfred. — Complètement oubliée, pourquoi ça ? Il y a longtemps que je serais venu te voir, plein de fois, si j’avais eu le temps... mais de nos jours, plus personne n’a plus une minute, avec toute cette crise et la pagaille ! Si mon ami Hierlinger Ferdinand, ne m’avait pas invité dans sa décapotable, qui sait quand on se serait revus !

La mère. — C’est très aimable de la part de ton ami, ce cher monsieur Hierlinger.

Alfred. — C’est un monsieur charmant, de toute façon. Dans une bonne demi-heure, il viendra me reprendre ici.

La mère. — Déjà ?

Alfred. — Malheureusement !

La mère. — Alors s’il te plaît, n’avale pas tout le lait caillé, j’ai rien d’autre à lui servir —

Alfred. — Ferdinand ne peut pas manger du lait caillé, il souffre d’une intoxication chronique par la nicotine. C’est un négociant on ne peut plus correct. J’ai assez souvent affaire à lui.

La mère. — Dans le commerce ?

Alfred. — Entre autres.

Un silence.

La mère. — Tu travailles toujours à la banque ?

Alfred. — Non.

La mère. — Où alors ?

Un silence.

Alfred. — Fonctionnaire, c’est pas pour moi, ça n’offre aucune possibilité de s’épanouir. Le travail, au vieux sens du mot, ce n’est plus rentable. Si de nos jours, tu veux avancer, il faut que tu travailles avec le travail des autres. Je me suis mis à mon compte. Opérations financières et genre —

Il avale de travers et est pris d’une quinte de toux.

La mère, lui tapant dans le dos. C’est bon ?

Alfred. — J’ai failli m’étouffer.

La mère. — Je suis contente que ça te plaise.

Un silence.

Alfred. — À propos de s’étouffer : où est passée notre chère grand-mère ?

La mère. — Elle est assise dans la cuisine, je crois, elle prie.

Alfred. — Elle prie ?

La mère. — La peur la rend malade.

Alfred. — La peur ?

Un silence.

La mère. — N’oublie surtout pas de lui souhaiter son anniversaire... Le mois prochain, elle aura quatre-vingts ans, si tu ne lui souhaites pas son anniversaire, ça sera de nouveau l’enfer pour nous autres. Tu sais bien que tu es son chéri préféré.

Alfred. — Je note. (Marquant.) Anniversaire grand-mère. Quatre-vingts. (Repus, il se lève.) Un âge canonique. (Consultant sa montre-bracelet.) Ça va être l’heure, je pense. Ferdinand sera là d’une minute à l’autre. Il y a une dame avec lui.

La mère. — Qu’est-ce que c’est que cette dame ?

Alfred. — Une dame d’un certain âge.

Un silence.

La mère. — Quel âge ?

Alfred. — Moyen.

La mère. — Elle a des sous ?

Alfred. — Je n’ai pas affaire à elle.

Un silence.

La mère. — Un riche parti, on crache pas dessus. Tu n’as pas encore dégotté celle qu’il te faut.

Alfred. — Possible ! Parfois, j’aimerais bien avoir une ribambelle de mômes autour de moi, mais après, je me dis toujours : le destin en a décidé autrement —

La grand-mère, sortant de la maisonnette son bol de lait caillé à la main. Frieda ! Frieda !

La mère. — Il y a encore le feu ?

La grand-mère. — Qui est-ce qui a volé mon lait ?

La mère. — Moi. Alfred chéri avait si bon appétit.

Un silence.

La grand-mère. — Il avait encore de l’appétit ? Il avait encore de l’appétit ? — Et moi, on me demande même pas ? Comme si je n’étais déjà plus là — (À la mère :) Ça te plairait, hein !

Alfred. — Bêêê !

Il lui tire la langue.

Un silence.

La grand-mère. — Bêêê !

Elle lui tire la langue.

Un silence.

La grand-mère, d’une voix perçante. Si c’est comme ça, je ne veux plus de lait du tout ! Tenez !

Elle vide son bol par terre.

Ferdinand Hierlinger entre avec Valérie, une quinquagénaire pomponnée, en tenue d’automobiliste.

Alfred. — Permettez que je fasse les présentations : ma mère, mon ami Ferdinand Hierlinger et madame Valérie — et là-bas, ma grand-mère chérie —

La mère. — C’est très gentil à vous, monsieur Hierlinger, d’avoir emmené mon Alfred chez nous, à la campagne — Je vous remercie beaucoup, merci —

Ferdinand Hierlinger. — Mais je vous en prie, mesdames ! C’est tout naturel ! Je vous l’aurais emmené plus souvent, ce cher Alfred... Alfred chéri n’avait qu’un mot à dire.

La mère. — Rien qu’un mot ?

Ferdinand Hierlinger. — Cela dit —

Il s’interrompt net, se rendant compte qu’il a probablement gaffé.

Un silence gêné.

Valérie. — Vous êtes bien ici, à la campagne —

La mère. — Est-ce que ça ferait plaisir à ces messieurs-dames de monter sur la tour ?

Ferdinand Hierlinger. — Où ça ? Où voyez-vous une tour ?

La mère. — Notre tour là-haut —

Ferdinand Hierlinger. — Dites donc, cette ruine si romantique appartient à votre seigneurie ?

La mère. — Non, c’est une propriété de l’État. Nous, on n’est que les gardiennes. Si vous le désirez, je vous amène — De là-haut, une vue magnifique ainsi qu’un panorama très instructif s’offrent au randonneur.

Ferdinand Hierlinger. — Avec plaisir, avec le plus grand plaisir ! Trop aimable, chère madame !

La mère, avec un sourire gêné. Mais je vous en prie ! (À Valérie :) Madame se joint à nous, j’imagine ?

Valérie. — Non merci bien... Je regrette beaucoup, je ne peux pas grimper si haut, je ne peux plus respirer en hauteur —

La mère. — Bon, eh ben, à tout à l’heure alors !

Elle sort avec Ferdinand Hierlinger.

Valérie, à Alfred. Monsieur pourrait-il me donner un petit renseignement ?

Alfred. — De quoi ?

La grand-mère s’installe à la petite table et tend l’oreille, mais sans rien entendre.

Valérie. — Tu m’as encore arnaquée, pour changer.

Alfred. — Autre chose pour votre service ?

Valérie. — Hierlinger vient de me raconter qu’à la dernière course à Saint-Cloud, la cote n’était pas à cent soixante-huit mais à deux cent vingt-deux —

Alfred. — Hierlinger ment.

Valérie. — Et cet imprimé là, c’est un mensonge, aussi ?

Elle lui fourre le journal hippique sous le nez.

Un silence.

Valérie, triomphante. Eh bien ?

Alfred. — Ben non, tu vois, tu n’es pas une vraie femme. Avec des méthodes pareilles, tu me repousses carrément —

Valérie. — Tu vas me donner immédiatement ce qui me revient. Vingt-sept schillings. Prego !

Alfred, lui remettant la somme. Ecco !

Valérie. Grazie !

Elle recompte.

Alfred. — Quelle mesquine tu fais.

Valérie. — Je ne fais rien du tout ! Et à partir d’aujourd’hui, j’exige une quittance écrite à chaque fois —

Alfred, la coupant. Ne monte pas sur tes grands chevaux, je t’en prie !

Un silence.

Valérie. — Alfred, faut pas que tu m’escroques tout le temps —

Alfred. — Et toi, faut pas que tu sois toujours aussi méfiante — Ça ne fait que miner notre liaison. Faut pas perdre de vue qu’un jeune homme a des côtés clairs et des côtés sombres. C’est normal. Et laisse-moi te révéler un secret : un rapport purement humain ne devient réel que quand on profite l’un de l’autre. Le reste, c’est du boniment. Et c’est en ce sens que je suis, moi aussi, pour ne pas rompre nos rapports amicalo-commerciaux, rien que parce que les autres rapports seraient peut-être malsains pour nous —

Valérie, le coupant Non, pouah ! Pouah — toi —

Alfred. — Eh ben, tu vois ! Te voilà avec une autre tête sur les épaules ! Ce serait trop insouciant quand même de ta part, pour ne pas dire inconsidéré ! Ta pension de feu le secrétaire en chef de cabinet, j’en fais quoi, moi, madame ? Du fait que je suis un as des champs de course ? Grâce à cette main dorée, madame veuve de secrétaire en chef de cabinet récolte le traitement d’un directeur de cabinet de première classe en activité !... Qu’est-ce que tu as encore ?

Valérie. — Tu me fais penser à la tombe.

Alfred. — Quelle tombe ?

Valérie. — La sienne. Chaque fois que j’entends secrétaire en chef de cabinet — ça me fait penser à sa tombe. (Un silence.) Je prends trop peu soin de la tombe. Ma foi, elle doit être envahie de broussailles —

Alfred. — Valérie, si demain je gagne à Maisons-Laffitte, on fera retaper sa tombe de fond en comble. Fifty-fifty.

Valérie lui baise brusquement la main.

Alfred. — Non, pas ça —

La voix de Ferdinand Hierlinger, du haut de la tour. Alfred ! Alfred ! C’est superbe là-haut, ça y est, je descends !

Alfred, lançant vers le haut. Je t’attends ! (Dévisageant Valérie.) Quoi ? Tu pleures ?

Valérie, larmoyante. Quelle idée... (Se contemplant dans son miroir de poche.) Dieu, que je suis dérangée... Vivement que je me donne un coup de rasoir

Elle se remet du rouge à lèvres en fredonnant la Marche funèbre de Chopin.

La grand-mère. — Alfred ! (Alfred s’approche d’elle.) Tu reviens quand ? Bientôt ?

Alfred. — Sûrement.

La grand-mère. — J’aime pas les adieux, tu sais... J’espère qu’il ne t’arrivera rien, souvent j’ai si peur —

Alfred. — Qu’est-ce que tu veux qu’il m’arrive ?

Un silence.

La grand-mère. — Quand tu me rendras l’argent?

Alfred. — Dès que je l’aurai.

La grand-mère. — C’est que j’en ai besoin.

Alfred. — Pourquoi tu as besoin de ton argent ?

La grand-mère. — Le mois prochain, j’aurai quatre-vingts ans — et je veux qu’on m’enterre avec mes propres sous, tu me connais, je ne veux pas d’aumône —

Alfred. — Ne te fais pas de mouron, mamie !

2

Une rue tranquille du huitième arrondissement.

De gauche à droite, la boucherie-charcuterie cossue d’Oskar avec, à l’étalage, des quartiers de bœuf et de veau, des saucisses, des jambons et des têtes de porc. À côté, une clinique de poupées, à l’enseigne de « Magiemag »... avec, en vitrine, des farces et attrapes, des têtes de mort, des poupées, des jouets, des feux d’artifice, des soldats de plomb et un squelette. Et au bout, un petit tabac avec, devant la porte, des journaux, des revues, des cartes postales. Au-dessus de la clinique de poupées, le balcon fleuri de l’appartement de Magiemag.

Oskar, en tablier blanc, se cure les ongles avec son canif, sur le seuil de la boutique : de temps à autre, il tend l’oreille car Légendes de la Forêt Viennoise, de Johann Strauss, lui parvient du deuxième étage, joué sur un piano déglingué. Sortant de la boucherie avec son cabas, Ida, une petite fille de onze ans, mignonne, maigre et myope, va pour tourner à droite mais s’arrête devant la vitrine de la clinique de poupées.

Havlitchek, garçon boucher d’Oskar, un géant aux mains et au tablier couverts de sang, surgit à la porte de la boucherie. Petite garce, va —

Oskar. — Qui ça ?

Havlitchek, désignant Ida de son long couteau. Elle, là ! Cette petite garce vient me dire que mon boudin n’est plus ce qu’il était... Ma foi, si je m’écoutais, je te la saignerais et c’est avec plaisir que je la verrais cavaler le couteau en travers de la gorge comme le cochon d’hier !

Oskar, souriant. Vraiment ?

Ida sent le regard d’Oskar, est prise d’une frayeur et tourne en courant le coin à droite. Havlitchek rit.

Un capitaine, en retraite depuis la débâcle et donc en civil, entre à gauche : il salue Oskar. Oskar et Havlitchek s’inclinent... Et la valse s’arrête.

Le capitaine. — Faut reconnaitre : le boudin d’hier... mes compliments ! First class !

Oskar. — Tendre, n’est-ce pas ?

Le capitaine. — Un poème !

Oskar. — Tu as entendu, Havlitchek ?

Le capitaine. — Serait-ce lui ?

Havlitchek. — À vos ordres : oui, capitaine !

Le capitaine. — Chapeau !

Havlitchek. — Vous êtes un connaisseur, capitaine. Un gourmet. Un homme du monde.

Le capitaine, à Oskar. À l’époque, j’ai été pas mal transbahuté dans notre vieille monarchie, mais alors là, il faut reconnaître : remarquable. Remarquable !

Oskar. — Les traditions, capitaine, il n’y a que ça !

Le capitaine. — Si votre pauvre maman, Dieu ait son âme, était encore de ce monde, elle serait fière de son fils.

Oskar, souriant, flatté. Le sort en a décidé autrement, capitaine.

Le capitaine. — Nous partirons tous, un jour.

Oskar. — Ça fait un an, aujourd’hui, qu’elle est partie.

Le capitaine. — Qui ça ?

Oskar. — Maman, capitaine. À deux heures et demie, en sortant de table... Notre Seigneur est venu la délivrer.

Un silence.

Le capitaine. — Déjà un an ?

Un silence.

Oskar. — Je vous prie de m’excuser, capitaine, il faut que j’aille me mettre sur mon trente et un... pour la messe des morts.

Il sort. Le capitaine, ailleurs, ne réagit pas.

Un silence.

Le capitaine. — Un an de plus... Jusqu’à vingt ans, on marche au pas, jusqu’à quarante au trot, et après, au galop —

Un silence.

Havlitchek, mâchant de nouveau. Elle était belle, la mise en terre de notre chère patronne.

Le capitaine. — Oui, très réussie —

Il s’éloigne vers le tabac, s’immobilise devant le squelette de la clinique de poupées : on s’est remis à jouer, au deuxième, encore une valse. Sur les flots. Havlitchek suit le capitaine des yeux, recrache la peau de sa saucisse et se retire dans la boucherie. Valérie surgit à la porte du tabac. Le capitaine la salue. Valérie le remercie.

Le capitaine. — Je peux consulter le tirage ? (Valérie prend une liste sur le présentoir et la lui tend.) Je vous baise les mains !

Il s’absorbe dans sa lecture ; la valse s’interrompt au beau milieu d’une mesure.

Valérie, avec un malin plaisir. Et qu’est-ce qu’on a gagné, capitaine ? Le gros lot ?

Le capitaine, lui rendant la liste. Chère Valérie, je n’ai jamais rien gagné. Dieu sait pourquoi je joue ! Au mieux, j’ai eu un billet remboursé.

Valérie. — C’est que vous êtes heureux en amour.

Le capitaine. — Autrefois, autrefois !

Valérie. — Capitaine, avec votre allure !

Le capitaine. — Ça n’a pas grande importance... quand on est un homme exigeant. Et c’est un trait de caractère qui revient cher. Si la guerre avait duré ne serait-ce que quinze jours de plus, j’aurais ma retraite de colonel.

Valérie. — Si la guerre avait duré quinze jours de plus, on l’aurait gagnée.

Le capitaine. — L’homme ne saurait tout prévoir —

Valérie. — Sûr.

Elle rentre dans son tabac.

Marianne reconduit une dame à la porte de la clinique de poupées... Chaque fois qu’on ouvre celle-ci, on entend, non pas une sonnette, mais un carillon. Le capitaine écoute, tout en feuilletant un journal.

La dame. — Je peux compter sur vous, n’est-ce pas ?

Marianne. — Absolument, madame ! Vous êtes chez le meilleur et le plus ancien fournisseur de tout l’arrondissement... Vous aurez vos soldats de plomb, madame, sans faute et à l’heure !

La dame. — Bon, alors juste pour qu’il n’y ait pas de confusion : trois boîtes de blessés et deux boîtes de mourants... et, s’il vous plaît, de la cavalerie, pas seulement de l’infanterie... et il me les faut après-demain matin, sinon Bébé va pleurer. C’est vendredi, son anniversaire, et il y a si longtemps qu’il veut jouer à l’infirmier —

Marianne. — Sans faute, madame, et à l’heure ! Au revoir, madame et merci !

La dame. — Au revoir !

Elle sort à gauche.

Magiemag, surgissant sur le balcon, en robe de chambre et fixe-moustaches. — Tu es là, Marianne ?

Marianne. — Oui, papa ?

Magiemag. — Où sont passés mes fixe-chaussettes ?

Marianne. — Les roses ou les beiges ?

Magiemag. — J’ai plus que les roses !

Marianne. — Dans l’armoire, en haut à gauche, au fond à droite.

Magiemag. — En haut à gauche, au fond à droite. Difficile est, satiram non scribere.

Il sort.

Le capitaine, à Marianne. Infatigable, comme toujours, mademoiselle Marianne ! Infatigable !

Marianne. — Il n’y a pas de honte à travailler, capitaine.

Le capitaine. — Au...

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