Acapulco sur cour

“Acapulco sur cour” est une comédie contemporaine qui démonte avec mordant les mécanismes du mensonge social et des apparences. Acculé par des déboires judiciaires et financiers, un banquier sans scrupule tente désespérément de préserver son image en simulant un voyage lointain, tout en se cloîtrant chez lui. Mais très vite, les imprévus s’enchaînent : visite impromptue de collègue, femme revancharde, concierges fantasques jusqu’à l’arrivée d’un mystérieux intrus. Le huis clos se resserre, le mensonge enfle, et l’absurde s’installe en maître. Entre faux-semblants, tension croissante et comique de situation, Acapulco sur cour est une pièce survitaminée à la mécanique implacable, où chaque personnage vient aggraver une mascarade déjà hors de contrôle.

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Acapulco sur cour

 

Comédie dramatique

 

 

de Louise de Rottweil et Eric Hubert

 

+ 352 621 623 045

erichubert05@yahoo.fr

huberteric.com

Distribution

(Par ordre d’entrée en scène)

Hélène

Robert

Barnabé

Diane

Régis

Mme Modrić

Yan

Guerda

Modeste

 

ACTE PREMIER

(Un luxueux appartement parisien. À part la porte d'entrée, 5 autres portes donnent respectivement sur la cuisine, la salle de bains et 3 chambres. Un confortable sofa 2 places fait face à un petit bar composé d'un comptoir discret en noyer verni derrière lequel de nombreuses bouteilles d'alcool trônent sur de sobres étagères. Une fenêtre ornée d'une tenture donne sur un jardin public. A noter qu'un compteur électrique apparent est situé près de la porte de la cuisine. Nous sommes en 1999, à l'aube de l'an 2000…)

Scène 1  (Hélène, Robert)

(Seule sur scène, Hélène parle à une plante verte qu’elle tient en main)

HÉLÈNE

Ne m’en veux pas, c'est un cas de force majeure. Tu es tellement belle ! Un petit baiser pour me faire pardonner…

ROBERT

(Entrant par la porte d’entrée)  Ha ! Ha ! Je savais que tu parlais à ta Couille-du-Pape ! En plus, tu lui fais des bisous !

HÉLÈNE

Couille-du-Pape, c'est pour les prolétaires. Son nom scientifique est "Araujia serieifera"

ROBERT

Oh ! Regarde comme ta petite Couille-du-Pape réagit quand tu l'embrasses, ses petites feuilles en tremblent encore ! Mais j'y pense, on ne serait pas à la limite du blasphème, là ?

HÉLÈNE

Tu es vraiment obscène !

ROBERT

Va la mettre dans la chambre de ton père.

HÉLÈNE

Robert, je ne comprends pas pourquoi tu tiens absolument à ce que nous nous cachions dans l’appartement.

ROBERT

Parce qu’on n’a plus un rond !

HÉLÈNE

On a beau être à la veille de l'an 2000, beaucoup de gens continuent à ne pas partir en vacances, de nos jours…

ROBERT

(Enervé)  Oui, mais pas moi ! Je te rappelle que je suis fondé de pouvoir au Crédit Lyonnais. Comment peux-tu me comparer aux gens, à la plèbe des petits fonctionnaires, des ouvriers, des chômeurs, des SDF pendant que tu y es !

HÉLÈNE

Non, pas les SDF. Ils ne peuvent pas se cacher chez eux pendant les vacances, puisque par définition, ils n’ont pas de « chez eux » !

ROBERT

En même temps que d’importants fonds pour le compte de la banque, j’ai placé tout notre argent, et même un peu plus, dans des actions qui étaient censées s'envoler…

HÉLÈNE

Elles ont décollé ?

ROBERT

Je le savais car j’avais eu des renseignements grâce à mes nombreuses relations dans les hautes sphères.

HÉLÈNE

C’est très bien, ça.

ROBERT

Mais non ! C’est un délit d’initié !

HÉLÈNE

Et ces actions finalement, elles se sont crashées ou envolées ?

ROBERT

Il y a enquête et elles sont toutes bloquées.

HÉLÈNE

Tu es sûr ?

ROBERT

Ça fait une semaine que je suis en congé, mais je me tiens au courant, tout de même !

HÉLÈNE

Je ne comprends toujours pas pourquoi nous allons être obligés de rester enfermés dans l’appartement pour faire croire que nous sommes partis en vacances ? Le voisinage ou encore nos amis pourraient soupçonner des problèmes d’argent ! Et alors ?!

ROBERT

Ma condition sociale ! Imagine si on apprenait que j'ai rejoint le club des miséreux !

HÉLÈNE

(Perplexe)  Les miséreux, carrément…

ROBERT

Tout le monde commencerait à jaser  (Il imite le commérage se déplaçant d’un coin à l’autre de la scène)  Les voisins : « Vous savez que les Barbeau n’ont plus un radis ? » Les voisines : « Etonnant pour des gens si cultivés… » Le concierge : « Le Barbeau n’a plus un copeck ! » La concierge : « C’est pas bon pour nos étrennes, ça » Mes subalternes : « Le Barbeau n’a plus de blé » Mes secrétaires : « À force de faire du foin pour trois fois rien, ça devait arriver !

HÉLÈNE

Tu crois que les gens sont si méchants ?

ROBERT

Je ne le crois pas, Hélène, j’en suis sûr ! Et puis, si nous sommes supposés être en vacances dans un pays lointain, je ne vois pas les agents du contrôle boursier nous forcer à rentrer plus tôt pour m'interroger. Ils attendront notre retour.

HÉLÈNE

Evidemment.

ROBERT

Donc, nous restons planqués ici pendant trois semaines, le temps que la situation se tasse… et quand nous rentrerons de nos vacances fictives, tout sera terminé. Je devrais pouvoir récupérer mon argent sans trop de problèmes.

HÉLÈNE

Comme d’habitude, tu as déjà tout planifié !

ROBERT

Eh oui, les esprits supérieurs, c’est ainsi. Bon, va mettre les attributs du Pape dans la chambre de ton père. Je suppose que tu as gardé le meilleur pour la fin et que c’est la dernière plante ?

HÉLÈNE

J’ai eu du mal à toutes les caser.

ROBERT

Notre frappadingue de voisine ne devrait pas tarder.

HÉLÈNE

Ne soit pas si méprisant avec elle.  (Elle entre dans la chambre en poussant délicatement une branche qui dépasse)

ROBERT

Planifions, planifions… esprit supérieur… et hop…  (Il sort un papier de sa poche avec la liste des choses à faire)  Voyons, je viens de mettre les valises dans la voiture. La voiture est dans le garage fermé à clé. La Poste est prévenue, les provisions sont faites. Crème bronzante… OK ! Documentation pour raconter les vacances au retour… OK ! Souvenirs mexicains achetés au rayon exotique des Galeries Lafayette… OK !

Scène 2  (Robert, Barnabé, Hélène)

BARNABÉ

(Entre avec un tas de revue sur les bras)  Ça y est, j’ai débarrassé toutes les librairies de leurs ouvrages sur la guerre d’Indochine. J’ai assez de lecture pour un siège de 3 semaines !

ROBERT

C’est bien, c’est bien…  (À mi-voix)  Bouquins pour grabataires du képi !

BARNABÉ

Qu’est-ce que vous dites ?

ROBERT

Rien !

BARNABÉ

Vous profitez toujours de ce que je suis un peu dur d’oreilles pour me dire des saloperies.

ROBERT

(À mi-voix)  Un peu dur d’oreille ?! Même un obus ne lui ferait pas lever le sourcil !

BARNABÉ

Comment ?

ROBERT

(Parlant plus fort)  Vous devriez augmenter le volume de votre appareil !

BARNABÉ

(Se dirige vers la chambre – À voix basse)  Espèce de primate décérébré !

ROBERT

Comment ? Qu’est-ce que vous avez dit ?

BARNABÉ

(Parlant plus fort)  Je disais : vous devriez vous acheter un appareil auditif. Oh, mais j’oubliais,  vous êtes sur la paille, ou plutôt comme la paille, fauché ! J’ai même dû payer les provisions !

ROBERT

(Furieux, entre ses dents)  Vieux débris…

BARNABÉ

Quoi ?

ROBERT

Rien.  (Dédaigneux)  Allez me mettre ce fatras dans votre chambre  (Barnabé se dirige vers la chambre – Entre ses dents)  C’est maintenant que je vais me marrer !

BARNABÉ

(Ouvrant la porte, il se prend la branche d’une plante sur la figure. Il laisse alors tomber ses revues et hurle)  Qu’est-ce que c’est que ce foutoir ?  (Robert est écroulé de rire)  Qui a fichu toutes les plantes de la maison ici ? C’est plus une chambre, c’est l’Amazonie ! Même mon lit est camouflé ! C’est encore vous ?

ROBERT

(Cachant difficilement sa joie)  Ça vous rappellera les forêts tropicales !

HÉLÈNE

(Sortant de la chambre)  C’est moi qui ai déplacé toute cette verdure, papa.

BARNABÉ

Mais pourquoi, Bon Dieu ?

HÉLÈNE

À cause de la voisine, madame Modrić.

BARNABÉ

Ivana ?

HÉLÈNE

Tu sais bien qu'elle vient arroser mes plantes vertes chaque année quand nous sommes en vacances. Elle a même un double des clés.

BARNABÉ

Ben quoi ? Il suffit de les récupérer, ces foutus clés !

HÉLÈNE

Tu la connais, si elle rentre ici et qu’elle voit mes plantes, elle ne pourra pas se résoudre à les laisser 3 semaines sans eau. Ce serait insupportable, pour elle. Elle serait même capable de demander aux concierges de lui ouvrir la porte avec leur passe.

BARNABÉ

Tu aurais pu mettre ces satanées plantes dans la chambre d’amis.

HÉLÈNE

Il n’y a pas assez de lumière, mes petites protégées sont extrêmement photosensibles et la fenêtre est toute petite. Et puis, c'est juste le temps que madame Modrić puisse constater qu'il n'y a plus aucune plante.

BARNABÉ

Toute cette végétation dans une seule pièce, je vais mourir asphyxié !

ROBERT

(À voix basse)  Ah, si seulement…

BARNABÉ

S’il vous plaît ?

ROBERT

Absolument, il faudra ouvrir la fenêtre.

BARNABÉ

(Enervé)  Si vous n’y voyez pas d’inconvénients, je vais m’installer dans la chambre d’amis, en attendant la visite d'Ivana.

HÉLÈNE

Au fait, mon chéri, tu sûr que c'est une bonne idée, le Mexique?

ROBERT

Qui ne rêverait pas d'aller à Acapulco ?! J’ai toute la documentation. Chacun devra l’étudier pour pouvoir raconter le voyage à notre retour. Pour l’instant, il faut savoir que nous prenons ce soir un vol de nuit à 2h du matin. C’est bien compris ?! Mettons-nous dans la peau de vacanciers heureux de faire un beau voyage au pays des tortillas.

BARNABÉ

(Ramassant ses revues et entrant dans la chambre)  Il me faudrait une machette, pour me frayer un chemin !

Scène 3  (Robert, Hélène, Mme Plumeau, Barnabé)

(On sonne)

ROBERT

C’est la voisine.

HÉLÈNE

Je vais lui ouvrir.

MADAME MODRIĆ

(Fort accent croate)  Vous encore là ? Pourtant j'avais noté date sur calendrier… Oui, je viens toujours arroser premier jour… des fois, dans précipitation départ, on oublie arroser… J'ai quand même sonné, pour prévenir plantes… faut pas effrayer plantes, alors avant entrer dedans j'ai sonné.

ROBERT

(Entre ses dents)  C’est elle qui est sonnée !

HÉLÈNE

Bonjour, Madame Modrić, nous vous attendions, justement…

MADAME MODRIĆ

Vous pas obligé, au revoir pas utile.

HÉLÈNE

Je voulais vous dire…

MADAME MODRIĆ

Oh ! Je raconte vous ce qui arrive à moi ce matin…

HÉLÈNE

Cette année pour mes plantes…

MADAME MODRIĆ

J’ai mauvaise nouvelle !

HÉLÈNE

Madame Modrić, à propos des plantes…

MADAME MODRIĆ

Chez moi, petit dernier, Zlatan, attrape oreillons.

HÉLÈNE

Le pauvre...

MADAME MODRIĆ

Chatte à moi a eu 8 petits.

HÉLÈNE

Je croyais que vous aviez 7 enfants ?

MADAME MODRIĆ

Eux beaucoup miauler : "miaou" !

HÉLÈNE

Ah, vous parliez de votre autre… celle qui fait "Miaou" !

MADAME MODRIĆ

J'ai peur que 6 autres attrapent aussi !

HÉLÈNE

(Perdue, réfléchissant à haute voix)  6 + 1 = 7 : vous parlez des oreillons cette fois !

ROBERT

(À mi-voix)  L'idéal serait que son mari les choppe !

MADAME MODRIĆ

(Ayant entendu Robert sans le comprendre)  Mari va bien, merci. Il veut noyer eux.

HÉLÈNE

Les enfants ?

ROBERT

Bonne idée, l’immeuble sera beaucoup plus calme.

MADAME MODRIĆ

Mais moi, je veux pas !

ROBERT

Evidemment, à cause des allocations familiales.

MADAME MODRIĆ

Je veux garder tous bébés chatons.

HÉLÈNE

Ça vous fera 7 enfants et 9 chats ?!

MADAME MODRIĆ

Vous savez fils boulangère mort ?

HÉLÈNE

Mon Dieu !

ROBERT

On s’en fout !

MADAME MODRIĆ

Mère pas assez de lait.

HÉLÈNE

La boulangère ?

MADAME MODRIĆ

Pauvre garçon, lui promené pendant orage, foudroyé par éclair !

ROBERT

Vanille ou chocolat ?

MADAME MODRIĆ

Je vais donner moi-même biberon.

HÉLÈNE

Aux bébés chats, c'est ça ?

MADAME MODRIĆ

Je crois je vais mettre eux dans colonie de vacances.

ROBERT

Les chatons ou les enfants ?

MADAME MODRIĆ

Je parlé beaucoup mais où plantes sont ?

HÉLÈNE

Justement, au sujet de mes plantes vertes…  (À ce moment, la porte de la chambre de Barnabé s’ouvre et une forte musique mexicaine remplie l’appartement ; il s'agit de la célèbre chanson folklorique "El Jarabe Tapatio". Barnabé sort vêtu d’un poncho et d’un chapeau mexicain. Il danse en jouant des maracas et invite madame Modrić à s'accrocher à lui pour improviser une chenille. Mme Modrić met alors une main sur son épaule et commence à danser en rythme avec son arrosoir dans l'autre main. Elle arrose par mégarde Robert et Barnabé. Hélène, prise par l'ambiance, tape dans ses mains.)

ROBERT

Ça va pas, non ?! C’est pas bientôt fini, votre cirque ?!  (Il enrage et va dans la chambre pour couper la musique. Quand la musique s’arrête, Barnabé et madame Modrić restent figés dans leurs positions Hélène applaudit en riant)

MADAME MODRIĆ

Monsieur Barnabé très rigolo ! Mon mari, lui, toujours mauvaise humeur !...  Bon, je dois aller, j’ai lait des chats sur feu !  (Elle sort précipitamment après un dernier regard vers Barnabé)  Adios, amigos !

BARNABÉ

Hasta la vista, Ivana.

ROBERT

(Sortant de la chambre)  Fini de rire, maintenant, Mme Modrić…  (Cherchant partout du regard)  Où est-elle ?

HÉLÈNE

Partie.

ROBERT

Tu te moques de moi ?! Et la clé de l’appartement ?

HÉLÈNE

Ils étaient tellement drôles, tous les deux, que ça m'est sorti de la tête !

ROBERT

Et vous, qu’est-ce qui vous a pris d’arriver déguisé en perroquet ? Juste au moment où la cinglée devenait cohérente !

BARNABÉ

C’est vous qui avez dit qu’on devait se mettre dans la peau de vacanciers heureux de faire un beau voyage au Mexique. Alors moi, je me voyais déjà à Caracas, et j’ai sorti les maracas !

ROBERT

Ça suffit ! Maintenant, vous allez me faire le plaisir de courir après cette demeurée et de lui reprendre la clé !

BARNABÉ

Je ne peux pas.

ROBERT

Comment ça, vous ne pouvez pas ?

BARNABÉ

Parce qu’elle m’a arrosé. Je suis tout mouillé.  (Il se dirige vers la chambre)  Je dois sécher mon pantalon  (Quand Robert ne regarde plus, il esquisse quelques pas de danse avec les maracas en l’air. Robert se retourne furtivement. Barnabé, surpris, lui fait alors signe au revoir avec les maracas. Furax, Robert se tourne alors vers Hélène. Celle-ci rit)

ROBERT

(Imitant Barnabé, avec une voix perchée)  « Je suis tout mouillé, je dois sécher mon pantalon ! » Quand je pense que cet homme se targue d'avoir fait l’Indochine ! Je vais aller la récupérer moi-même, cette clé, et ça ne va pas traîner !  (Il s'apprête à sortir puis se ravise)  Je vais peut-être moi aussi aller sécher mon pantalon avant de sortir, je n'ai pas envie qu'on croie qu'en plus, je deviens incontinent. Un sèche-cheveux, il me faut un sèche-cheveux !  (Il va dans la salle de bains)

Scène 4  (Robert, Hélène, Diane,  Mme Plumeau)

(On tambourine violemment à la porte, Hélène va ouvrir. Diane entre comme une furie sans même saluer Hélène)

DIANE

Barbeau… Robert Barbeau ! Je veux rencontrer cet odieux personnage sur-le-champ !

HÉLÈNE

Madame…

DIANE

Qui êtes-vous ?

HÉLÈNE

Mais Madame…

DIANE

La domestique, je suppose. Allez chercher votre patron !

HÉLÈNE

Ça, par exemple !

DIANE

Veuillez obtempérer, ma petite, ou il pourrait vous en cuire !

HÉLÈNE

Dites donc, grande saucisse, si vous ne sortez pas d’ici tout de suite, c’est vous que je vais faire cuire !

DIANE

Oh, quelle impudence ! Comment avez-vous osé me...

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