Le Grand Rapt

Anna et Pierre sont frère et sœur, ils vivent tous les deux en colocation dans l’appartement inoccupé de leur grand-mère, décédée l’année d’avant. Catherine, leur mère, les autorise à ne pas payer de loyer, à condition, qu’en échange, ils rénovent l’appart pour pouvoir le vendre. Alors qu’Anna est en train de charger des cagettes de légumes dans son camion au salon de l’automobile, elle surprend Marc Castillo, le ministre de l’économie en train de fumer un joint. Celui-ci voulant l’aider à charger un cageot se blesse avec une agrafe et tombe dans les pommes en se cognant violemment la tête sur la boule d’attelage, perdant ainsi connaissance. Anna panique et le charge dans son camion pour le ramener à la coloc. Après avoir mis en scène un ridicule stratagème, ils vont devoir s’expliquer auprès du ministre qui au même moment s’aperçoit que sa disparition est reçue avec beaucoup d’émotion et fait mécaniquement oublier ses casseroles judiciaires. Il va donc leur proposer un deal en leur offrant une occasion de se racheter. Ils vont faire croire à un enlèvement politique. C’est en ces circonstances qu’une étrange cohabitation va se créer…

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Liste des personnages (7)

ANNABELLE Femme • Jeune
Militante engagée, Anna bosse pour une AMAP de quartier. Elle a une camionnette dans laquelle elle a vécu un moment qu'elle met à disposition de l'Amap. Elle est sanguine mais fidèle à ses principes. C’est la grande sœur de Pierre
PIERRE Homme • Jeune
Développeur informaticien en free-lance, il enchaîne les entretiens d'embauches. Timide et anxieux, ses entretiens sont à chaque fois des démonstrations de maladresse. Anna et Pierre sont colocataires. L'appartement est celui de sa grand-mère qu’ils occupent gratuitement de manière provisoire en échange de quelques travaux de rafraîchissement, en vue d'une vente. Pour arrondir ses fins de mois, il bosse pour Deliveroo. Il n'accepte que les commandes pour les restos végétariens. Il est souvent dans sa bulle. Toujours en galère de tunes, il mange dans les commandes qu'il livre
MARC CASTILLO Homme • Adulte
Ministre de l'économie et des finances. Il est la cible de Mediapart dans une affaire de dissimulation de patrimoine. Sujet au psoriasis, sa cheffe de cabinet lui a conseillé le CBD, qu'il fume en cachette. C’est un jeune loup “centriste” de droite.
CATHERINE Femme • Âgé
c'est la mère de Pierre et Annabelle. Ancienne prof de philo, elle est de gauche. Sa jeunesse a été marquée par son militantisme étudiant passant de Maoïste, à Trotskiste et finalement socialiste. Elle passe son temps à cacher des choses à son mari, très casanier
Sylvie Femme • Adulte
La cheffe de cabinet du ministre : Parisienne carriériste, elle maîtrise la communication. Elle a de l’expérience et connaît bien le milieu dans lequel elle évolue.
LIEUTENANT CROSSARD Femme • Adulte
flic de la SDLP : Lieutenant de police taciturne. Elle parle un langage brut et direct. Elle n’est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds. Elle se remet difficilement d’une rupture amoureuse
Mme Ortéga Femme • Âgé
la voisine : Vieille dame gentille mais attachée à sa tranquillité. Elle connaissait bien la grand-mère de Pierre et a une fâcheuse tendance à mal choisir son moment.

Décor (1)

Vieil appartement nantais Un appartement ancien de centre-ville en rénovation. Il est aménagé en colocation le temps des travaux. Le décor est dans un format modulable permettant de créer des scènes focus dans le salon, la chambre, le couloir avec la porte d’entrée et le toit de l’immeuble. Le salon est équipé d’une table basse, d’un canapé et un pouf ainsi qu’un meuble TV. Un pupitre à roulettes se place en avant-scène devant le rideau fermé pour recréer une tribune politique et une cheminée de toit d’immeuble sur la scène finale. Le décor peut-être plus minimaliste, en créant les trois espaces en lumière et en utilisant des éléments de décors modulables.

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ACTE 1

EPISODE 1 - LE SALON DE L’AUTO

 

Le brouhaha du salon de l’automobile se fait entendre dans la grande salle de la cité des congrès de Nantes. Marc Castillo, le ministre de l’économie, après avoir profité d’un bain de foule et serré quelques mains, monte à la tribune pour déclamer un discours. (Il fait un signe des mains pour capter l’attention et se lance)

 

MARC CASTILLO

Bonjour à toutes et à tous ! Alors, je vous rassure: je serais bref. Et oui je vais donner tort à mes détracteurs sur ce point, car j’en suis capable, croyez-moi !

 C’est avec une immense joie et beaucoup de fierté que je suis, aujourd’hui, à Nantes pour inaugurer le premier salon de l’automobile mobile, et non, non je ne bégaye pas en disant cela, car en effet il s’installe cette année, et c’est une première, en province, dans la magnifique ville de Nantes. Nous avions à cœur avec Mme Delfond, ministre de la cohésion des territoires, de décentraliser cet événement et de l’organiser, chaque année, dans une ville différente, pour le rendre plus mobile et par ce fait plus accessible aux français. Et c’est aussi l’occasion de rompre avec ce qui pourrait être interprété en province comme du parisianisme dans l’organisation des grands événements, comme celui du salon de l’automobile. Pourquoi n’y avons-nous pas pensé avant? Quoiqu’il en soit, c’est aujourd'hui chose faite et je m’en réjoui. Le président Pompidou disait “L'automobile est le signe de la libération de l'individu” et en effet, il avait raison, c’est une facteur important de l’émancipation d’une nation, l’ouverture à une forme de liberté. Et la France, qui est une nation qui “aime sa bagnole” pour rester dans les citations présidentielles, a su avec agilité adapter son industrie automobile aux contraintes et défis de notre temps, j’entends évidemment par-là, la concurrence du marché international, bien sûr… Mais aussi et surtout à l’enjeu euh… (il tousse) climatique… avec notamment (il tousse) la mise circulation des moteur hybride et électrique (Il tousse) pardon… qui représente aujourd'hui pas moins de 5% du parc automobile français. Voilà… Je suis d’autant plus fier, mais ça c’est à titre personnel, que cette première édition ait lieu à Nantes, car ma femme, Cécile, a fait ses études à Nantes et c’est elle qui m’a initié aux douceurs des Berlingots nantais, je ne parle pas ici de la voiture, qu’on s’entendent bien, Ah Ah ah! Et je peux l’avouer maintenant, cette ville a très certainement participé au succès de notre rencontre, à défaut de la pluie bretonne qui s’invite un peu trop souvent ici quand-même… Je taquine bien évidemment, je taquine ! Et loin de moi l’envie de relancer, ici, des vieilles guerres de clocher ou vous prendre en otage en vous racontant ma vie, je ne vais pas monopoliser plus longtemps les projecteurs qui n’attendent qu’à être braqué sur les véritables vedettes de ce salon, à savoir : les voitures évidemment! Je pense avoir tenu ma promesse et qu’il nous reste un peu de temps pour, si vous le souhaitez, répondre à quelques questions.

 

(En arrière-plan on aperçoit la cheffe de cabinet du ministre qui fait signe que ça n’est pas une bonne idée. Un mini larsène de micro se fait entendre et la voix d’une journaliste retentit)

 

JOURNALISTE

Monsieur le ministre, si les français, selon vous, aiment la bagnole comme vous dites, ils aiment aussi la transparence. Pourriez-vous, dans ce sens, nous éclairer sur la récente parution de Médiapart sur l’affaire de dissimulation de patrimoine qui vous met en cause?

 

(Un léger larsène se manifeste une seconde fois avant de laisser place à un silence un peu gênant)

 

MARC CASTILLO

Ecoutez… Il y a une autre chose que les français ont à cœur, madame: c’est la présomption d’innocence. J’ai une confiance aveugle en la justice et je sais qu’elle saura me disculper de ces accusations ridicules. D’ici là, je vous prierai de vous concentrer sur le sujet d'aujourd'hui et de quitter votre robe de magistrat du tribunal populaire pour vous recentrer sur votre mission de journaliste…

 

JOURNALISTE

Vous parlez de notre mission d’informer de manière factuelle la population ou celle de questionner nos élus sur leur intégrité et leur sens du devoir?

 

MARC CASTILLO

Euh… (Petite toux nerveuse) Alors… Je… Je vais vous dire une chose… Et… Parce que… Bon… Attention, attention avec ce petit ton vindicatif madame… Vous savez…

 

SYLVIE (Cheffe de cabinet)

(...) Allez allez, merci pour vos questions mais monsieur le ministre est attendu sur les stands et le temps n’est malheureusement pas élastique. Mesdames et messieurs, merci et bonne visite du salon…

 

(On entend le chahut des appareils photos et les vociférations journalistiques, le chef de cabinet entraîne le ministre dans un endroit calme, il ouvre une porte et la referme - Le bruit extérieur s'atténue au claquement de la porte)

 

MARC CASTILLO

Écoutes Sylvie, je sais très bien ce que tu vas me dire… Alors ne te fatigue pas ! Et puis ça va, je n’ai plus l’âge de me faire remonter les bretelles comme un écolier dans des arrières cuisines… En plus, j’allais la remettre à sa place, cette petite connasse…

 

SYLVIE

On ne peut pas, Marc! On ne peut pas se laisser piéger comme ça! Pas en ce moment! Vous n'avez pas le droit de glisser comme ça ! Pas maintenant… C’est une erreur de débutant, ça . Non! Non! (Elle regarde son téléphone) Et merde, bon bah voilà c’est parti…

 

MARC CASTILLO

Qu’est ce qui est parti? Ça tweete? Déjà? Ce n’est pas vrai? Putain! Ils dégainent plus vite que leurs ombres ces salopards(Il sort, lui aussi, son téléphone mais la cheffe de cabinet lui prend des mains)

 

SYLVIE

Hop hop hop… Allez, on reste focus sur le salon et on oublie ça. Maître Cougnaud est sur le dossier, on va bien… (Elle observe le ministre qui se gratte nerveusement le cuir chevelu) Ne grattez pas! Après ça vous fait des… des chipsters sur les épaules ! Et puis c’est pas bon, ça ressort à l’image, ça… (Elle frotte les épaulettes du costume du ministre)

 

MARC CASTILLO

(Il dénoue sa cravate)

J’en peux plus là! J’ai l’impression d’être un cerf traqué pendant une chasse à courre. J’ai beau essayer de faire profil bas ou de me planquer j’ai toujours ces… ces putains de bois, là, qui dépassent des buissons. Vous voyez?

 

SYLVIE

Oui oui je vois bien. L’image est belle…

 

MARC CASTILLO

Je ne vais pas pouvoir tenir comme ça longtemps, Sylvie… J’ai l’impression de faire des sauts de cabri, là, pour éviter les bastos.

 

SYLVIE

Bon à un moment, Marc, les chargeurs seront vides et ils sonneront la fin de la chasse! D’ici là… On rase les bosquets et on ARRÊTE! On arrête de leur offrir des fenêtres de tir ! Entendu? L’objectif c’est qu’ils changent de proie (...)

(Le ministre acquiesce tout en se grattant, Sylvie sort une petite pochette en tissu et la donne discrètement au ministre)

Bon allez, assez parlé “Chasse et pêche” je vais vous laisser dix minutes, pas plus, pour souffler un peu. Allez vous fumer votre p’tit joint de CBD discrètement sur le quai de chargement des cuisines. Je vais temporiser en attendant. Et arrêtez de vous gratter par pitié !(Elle le frotte en soufflant)

 

MARC CASTILLO

Merci Sylvie…

 

SYLVIE

Allez Marc, la tête haute (Il se redresse) L'œil vif (Il écarquille les yeux) le sourire conquérant (Il sourit à pleine dents) Le monde est à vous !!!

Il est à qui le monde?

 

MARC CASTILLO

A moi!

 

SYLVIE

A qui?

 

MARC CASTILLO

A moi!

SYLVIE

A qui? A qui? A qui?

 

MARC CASTILLO

A moi ! A moi! A moi!

 

SYLVIE

Voilà… Allez demain, il fera beau, Marc… Et ARRÊTEZ DE GRATTER !!

EPISODE 2 - UN INVITÉ

 

La lumière s’estompe - La musique se lance - Le rideau s’ouvre sur l’intérieur d’un appartement.

 

(Des sirènes de police retentissent, on aperçoit la silhouette d’Anna dans la pénombre qui pénètre dans l’appart en traînant ce qui semble être le corps d’un homme. Elle l’installe sur une chaise, allume la radio et court à la cuisine chercher des bandages. Elle s’installe en face de lui. Il est inconscient. Elle le recoud et lui bande la tête. Elle ferme la fenêtre pour ne plus entendre les sirènes de police. Elle s’allume une clope et reste là à le fixer)

 

“Et nous poursuivons cette édition spéciale. Les recherches s’étendent à présent sur plusieurs quartiers du centre-ville de Nantes. Les barrages filtrants qui ont été installés aux abords de la ville dégradent considérablement les conditions de circulation. La place Beauvau a indiquée, il y a quelques heures, qu’une cellule de crise avait été ouverte et qu’une antenne de la DGPN était actuellement en route pour prendre la direction des opérations sur place afin de retrouver au plus vite le ministre Marc Castillo qui, on le rappelle, aurait mystérieusement disparu en fin de journée lors du salon de l'automobile organisé à la cité des congrès de Nantes. Le ministre de l’intérieur rappelle qu’il est encore trop tôt pour parler d’enlèvement mais tout porte à croire, ce soir, que…”

 

(Anna coupe la radio)

 

PIERRE

(Il entre dans l’appartement en tenue de cycliste-livreur Deliveroo. en poursuivant une conversation au téléphone, tout en grignotant dans un sac en papier kraft. Il salut Anna et pose son casque de vélo et ses affaires, il ne remarque rien)

 

Je sais bien que c’était le deal maman mais je ne pense pas que tu te rendes compte du boulot! C’est un vieil appart, faut tout rafraîchir (...) Oui, les peintures sont bientôt finies. On a fini la sous-couche dans la chambre de mamie mais on n’a pas encore évacué le lit médicalisé parce qu'on… Quoi? Quand est-ce qu'ils veulent venir visiter? (...) Cette semaine? Attends, attends, c’est un peu juste là… Je sais bien, je sais bien…

Écoutes, je te garantis rien mais on va essayer de tout cleaner mais c’est pas.... Nos recherches d’appart? Bah… écoute heu… Oui ça avance bien… Moi j’aiiii euh… plusieurs touches…

Oui voilà… Et le travail, bah oui le travail, pareil j’ai eu plusieurs touches aussi mais… Maman je te le redit : un bon infographiste c’est un infographiste qui… (Il attend la réponse) se fait désirer voilà…

Je vais devoir te laisser maman, j’viens de rentrer et… Anna? Oui elle est là… (Anna fait signe que non) Ouiiii bien sûr je te la passe.

 

(Il lui jette malicieusement son téléphone. Pendant ce temps, il se déshabille et boit sa gourde)

 

ANNA

Ouiiii maman… Très bien. Voilà… Ok… Je ne sais pas… Hum… Si tu veux… Ok… C’est ça… bisou

(Elle raccroche)

 

PIERRE

Putain mais comment tu fais toi? Moi elle barbe pendant une heure et toi tu l’expédie en deux secondes! C’est quoi ton arme secrète?

 

ANNA

Tu es trop laxiste… Si tu ne poses pas un cadre et tu montre une pointe de faiblesse, elles le sentent, les daronnes, et puis après elles s’infiltrent et c’est l’engrenage… Elles viennent te faire la...

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