Les pieds

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Immobile. La pensée est à l’arrêt. La mort physique n’a plus de réalité. Le temps a été congelé dans une tiédeur douceâtre. Serait-ce une fin attendue de l’histoire ?
Condamnés à l’immortalité, les hommes errent à la surface plane d’une époque sans nom. Une époque hors des âges, règne du confort stérile. Sans souffle, sans surprise : désactée.
Aux lieu et place de l’action, des certitudes s’échangent entre les maigres personnages à venir ici. Tous sont à la poursuite d’une mémoire qui n’est même plus un souvenir.
Leurs chétives vérités traversent sans rebond ni blessure l’espace vidé. Englués dans le vieux style de la planète silencieuse, seront-ils capables de se haïr ?
Ils vont nu-pieds au bord du présent intemporisé, vers une improbable mutation.
De l’amour de deux personnages viendra le meurtre, peut-être rédempteur.
Avec l’arrivée de la pluie, il se passe quelque chose, la concrétisation de l’action globale ; tout sera différent. On entrevoit une prémisse d’harmonie. Il peut pleuvoir sur la scène du théâtre, ce serait même le seul élément réaliste – presque vériste – de cette pièce. Cela produira sur le spectateur une superposition esthétique brutale qui le mettra d’abord en état de plaisir, puis deviendra vite inconfortable.

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prologue

 

Texte introductif lu par le public (sur le programme et/ou un écran),

puis dit ou chanté par un ou plusieurs personnages.

 

Immobile. La pensée est à l’arrêt. La mort physique n’a plus de réalité.

Immobile. Le temps est congelé dans une tiédeur douceâtre. Serait-ce une fin attendue de l’histoire ?

Condamnés à l’immortalité, les hommes errent à la surface plane d’une époque sans nom. Une époque hors des âges ; règne du confort stérile. Sans souffle, sans surprise. Désactée.

Aux lieu et place de l’action, des certitudes s’échangent entre les maigres personnages à venir ici. Tous sont à la poursuite d’une mémoire qui n’est même plus un souvenir ...

Leurs chétives vérités traversent sans rebond ni blessure l’espace vidé. Englués dans le vieux style de la planète silencieuse, seront-ils capables de se haïr ?

Ils vont nu-pieds au-delà du présent intemporisé. Pour quelle mutation ?

 

 

 

 

 

scène 1   INTÉRIEUR

 

 

Abel B. et Bernard-Hector Deso (porte Abel B.) entrent.

Abel B. allume la lumière.

 

Abel B.                                      Pensez-vous que pour mettre au monde, il faut du temps ? Je veux dire : la facilité n’est peut-être pas enrichissante.

Bernard-Hector DESO            Faut voir, mais ce n’est pas évident.

Abel B.                                      (il s’adresse au public) Si vous croyez que c’est facile de ... Il y a deux sortes d’hommes. Non, il y a une sorte d’hommes, une sorte de femmes.

Bernard-Hector DESO            Mmm.

Abel B.                                      Non.

Bernard-Hector DESO            Heu ... Heu.

Abel B.                                      Non, il y a quarante-trois sortes de ...

Bernard-Hector DESO            De ?

Abel B.                                      Quand on écrit sans réfléchir, ça peut donner des résultats.

Bernard-Hector DESO            C’est automatique.

Abel B.                                      Ah, ah, ah. Il faut souffrir pour accoucher ; sans doute.

Bernard-Hector DESO            Si vous étiez plus simple.

Abel B.                                      Je me tue à vous expliquer que j’en chie !

Bernard-Hector DESO            Mais merde. Il n’y a que vous sur terre ?!

Abel B.                                      Quelle terre ? Celle qui éclate ? Celle des vivants ? La terre des gens sérieux, des marchands ? La terre des bonnes notes et des punitions aux virus militaires ?

Bernard-Hector DESO            La France est le bronze-culs de l’Europe.

Abel B.                                      La terre est une merde en bronze.

Bernard-Hector DESO            Dans la galaxie.

Vacarme, tremblement de terre, etlerst. Ils attendent le silence complet.

Georges entre d’un pas décidé.

Bernard-Hector DESO            Voilà Georges.

GEORGES                                Me voilà !

Abel B.                                      Qu’est-ce qu’il voit, là ?

GEORGES                                Je vois la fin de nos soucis.

Abel B.                                      Ce type est une brute.

GEORGES                                Qu’est-ce qu’il dit, là ?

Bernard-Hector DESO            Il dit que vous êtes une brute.

GEORGES                                Dites-lui que j’en ai autant à son service.

Bernard-Hector DESO            Dites-le-lui vous-même.

Abel B.                                      Je l’avais dit : ce type est une brute. Épaisse.

Après avoir hésité devant sa porte, Bernard-Hector Deso sort par celle d’Olympia.

GEORGES                                Qu’est-ce que vous dites ?

Abel B.                            Pendant que vous y êtes, faites encore plus de bruit en arrivant.

GEORGES                                C’est toujours comme ça que j’arrive.

Abel B.                                      (il soupire) C’est vrai. Depuis quand au fait ?

GEORGES                                Oh, longtemps. Au début, c’était plutôt difficile, pour la coordination. Bah, avec l’habitude, on y arrive. Je dois avouer que ça fait son petit effet.

Abel B.                                      Ça impressionne.

GEORGES                                Les foules.

Abel B.                                      C’est ce qui compte.

GEORGES                                Eh oui. Chacun son truc.

Abel B.                                      Vous n’avez jamais pensé changer de truc ?

GEORGES                                Bien sûr. Mais celui-ci fonctionne parfaitement.

Abel B.                                      Évidemment.

GEORGES                                Pourquoi vouloir changer toujours ? Décidément, je ne vous comprends pas.

Abel B.                                      Avez-vous entendu parler de l’ennui ?

GEORGES                                Ça vous ennuie ?

Abel B.                                      Quoi ?

GEORGES                                Que je sois là.

Abel B.                                      L’existence des gens de votre espèce me blesse. Vous empêchez la terre de tourner.

GEORGES                                Et qui fait tourner le monde ? Qui fait tourner les pays ? L’é-co-no-mie.

Abel B.                                      Les cons justement nommés. Sans vous, ça tournerait bien plus joli. Sans vous, on tournerait dans les sens qu’on veut.

Musique. Ils dansent.

 

scène 2   INTÉRIEUR

 

 

Le Cordonnier entre avec son chariot.

 

Le CORDONNIER                    Chaussures ! Souliers ! Sandales ! Pompes ! Chaussons ! Bottes ! Tatanes ! Brodequins ! Babouches ! Savates ! Godasses ! Pantoufles ! Sabots !

GEORGES                                Vous faites les chaussettes ?

Le...

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