Seul En Scene Humoristique Et Philosophique Avec Titre Long

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Avec humour l’auteur pose à sa manière les grandes questions philosophiques : notre place dans l’univers, la fragilité de nos vies, notre quête de sens, la recherche d’un espoir…

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I

Avant même de vous dire bonsoir, et n’y voyez aucune impolitesse de ma part, je passe dans les travées pour vous offrir un cadeau. Je n’en ai pas pour tout le monde. Je suis comédien, pas charpentier. Et je m’empresse de faire à votre place les ineptes jeux de mots qui vous brûlent les lèvres : c’est le clou du spectacle ! Le comédien ne vaut pas un clou ! Il va nous planter là ! Son solo est à clouer au pilori ! Point de calembours je vous prie, car sans le savoir vous vivez en cet instant un magnifique moment initiatique. Je vous en expliquerai le sens à la fin du spectacle. Ainsi je pense pouvoir me garantir votre présence jusqu’au bout.

Prenez plaisir à toucher cet objet, à en explorer la surface lisse, puis passez-le à votre voisin.
Je vais maintenant vous laisser trente secondes pour méditer sur votre existence et sur les raisons profondes expliquant votre présence ici ce soir. (Il s’empare du sablier, le retourne et attend patiemment qu’il se vide). Merci. Donc : bonsoir. Le spectacle peut commencer. « Mais ton spectacle a déjà commencé » me direz-vous. Ce à quoi je répondrai : je ne vous permets pas de me tutoyer.

II

Un certain matin je me suis levé avec deux désirs irrépressibles. Le premier : mettre fin à mes jours. Le second : faire l’acquisition d’un cyclamen. Par simple souci de cohérence je décidai immédiatement d’inverser l’ordre de ces priorités.
D’ailleurs l’abîme de questionnement dans lequel je sombrais quant à ce soudain désir floral éclipsa tout aussi soudainement mes velléités de basculer dans un monde dit meilleur. En tous cas pas dans l’immédiat. A chaque jour suffit sa peine. L’urgence était au cyclamen. Laquelle urgence précipita mes préparatifs. En l’espace de dix minutes je passais de ma couche au pallier de mon immeuble, m’habillant à la hâte, bâclant ma toilette, avalant un mauvais café réchauffé de la veille. C’est ainsi que, dépenaillé et coiffé à la diable, je faillis littéralement tomber sur ma voisine du rez- de-chaussée rentrant des courses avec son cabas dans une main et son pékinois dans l’autre. Comme à son habitude l’étrange femme fit un triple signe de croix devant mon front, cracha trois fois par terre avant de s’écrier Prosper mon amour et de disparaître dans son appartement.

Je ferai ici une courte digression : quand je dis ma voisine rentrait des courses, je veux dire qu’elle venait de l’hippodrome, lieu où elle dilapide l’essentiel de son argent en misant sur les pires canassons. Quant à Prosper, ce n’est pas, comme on pourrait le croire, le nom de son chien mais celui de son cabas, dont elle ne se sépare jamais, même quand elle va aux courses. Le pékinois quant à lui s’appelle Lao-Tseu, comme il se doit.

Je me trouvais donc poussé par l’enthousiasme d’une urgence. Dans le feu d’une impulsion incontrôlable. Dans l’inexplicable effervescence capable de pousser l’individu le plus timoré à l’acte le plus déterminé.

Pourtant, Dieu m’en est témoin, pas une fois dans ma vie je n’ai éprouvé d’attirance particulière pour un bouquet, une touffe, une gerbe ou tout autre arrangement floral, et je n’ai jamais fréquenté le moindre boqueteau. D’ailleurs j’aurais été bien en peine de me figurer un cyclamen. Je n’en connaissais ni la taille ni la forme. Mes connaissances du règne végétal me permettent à peine de distinguer une pâquerette d’un plan de maïs.

Mais je désirais ardemment un cyclamen. Rien d’autre. Il me le fallait maintenant, quel qu’en soit le prix. J’aurais bien le temps ensuite de chercher à élucider le mystère d’un appétit qui, par son intensité, s’apparentait à un brutal réveil de libido. J’étais donc là sur ce trottoir, chose assez fréquente quand on sort de chez soi, couvert d’un simple tee-shirt en plein mois de décembre. Il y a une jardinerie à huit cent mètres de chez toi, me dis-je, car j’aime à me tutoyer. Je m’y rendis presque en courant. Nous étions un vendredi. 16 heures. Le vaste magasin était donc ouvert, et une bonne dizaine de pots en gré estampillés cyclamens trônaient devant l’entrée. Il y a des moments dans la vie où toutes les planètes sont alignées, dégageant ainsi une perspective allant bien au-delà de nos espoirs les plus fous. Me dis-je !

III

Les scientifiques s’accordent à penser que le Big Bang a eu lieu il y a 13,7 milliards d’années. Un débat les anime encore pour savoir si ce fut un mardi ou un mercredi. Mais nous n’entrerons pas dans ces querelles d’experts. Notre Terre s’est formée il y a 4,5 milliards d’années. Les premières traces de vie remontent à 3,5 milliards d’années. Le dernier dinosaure est mort 65 millions d’années avant la naissance de Steven Spielberg. Les premiers Homos Sapiens sont apparus il y a 2,5 millions d’années, en Afrique nous dit-on, ce qui explique certainement la prépondérance des joueurs noirs dans l’équipe de France de football. Enfin l’Histoire avec un grand H débute avec l’invention de l’écriture il y a 5000 ans, un chiffre effarant quand on sait que neuf français sur dix ne savent toujours pas orthographier correctement le mot coccyx.

Nous avons donc tous passé 13,7 milliards d’années dans les limbes, inexistants, incréés, absents, imprésents, immatériels, chimériques, avant d’être extirpés de ce néant par quelques malencontreux coups de reins mâles pilonnés dans une matrice femelle n’aspirant...

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