Acte 1
Décor : La cuisine d’un fermier en été, une table, deux bancs (ou 6 chaises), un téléphone, de la vaisselle. Une porte vers
l’extérieur, une porte vers les chambres.
Scène 1
Marie, Jeannot, Violette
Ouverture du rideau : Marie est en train de préparer le repas de midi.
JEANNOT (entrant) - Alors, qu’as-tu fait de bon à manger Marie ?
MARIE -Tu penses déjà à manger ? Mais ma parole tu n’es qu’un ventre ambulant !
JEANNOT - Non ma femme, je pense à boire aussi, passe-moi donc un verre et la bouteille !
MARIE -Voilà le verre et voici la bouteille.
JEANNOT - Merci. Mais elle est vide !
MARIE -Oui, elle est vide mais tu m’as demandé la bouteille pas ce qui est dedans !
JEANNOT - Oh ne joue pas la maligne hein ! Moi je reviens de la paille, j’en ai partout que ça me gratte comme le diable jusqu’à la gorge qui m’irrite alors : J’AI SOIF !
MARIE -Et moi monsieur le travailleur aux champs d’Honneurs, j’ai fait la lessive et le repassage et j’ai soigné les poules et les lapins et les cochons et j’ai fait dix bocaux de confit et deux de champignons et cinq de confiture et la soupe et j’ai recousu ton bleu et coupé du bois et j’ai fait le courrier et trié les pois !
JEANNOT - Huh ! En trois jours ?
MARIE -Non ce matin et si ça ne suffit pas j’ai aussi...
JEANNOT - Bon bon ça va ça va ! (A part.) Mais tu n’as pas
rempli la bouteille...
MARIE -Tu dis ?
JEANNOT - Non, rien, rien, VIOLETTE ! VIOLETTE ! Qu’est-ce qu’elle fait celle-là ! VIOLETTE !
VIOLETTE (entrant) - C’est bon, c’est bon, y’a pas le feu non plus ! Si ? Y’a le feu ?
JEANNOT - C’est comme ça que tu parles à ton père toi ? Tu veux une calotte ? Qu’est-ce que tu étais encore en train de faire ?
VIOLETTE - Rien. Je regardais les étoiles.
JEANNOT - Les étoiles ? A 11h30 du matin ! Mais il faut te faire soigner ma petite ! T’entends ça Marie ? Ta fille regardait les étoiles... en plein jour !
MARIE -Oh laisse faire, tu sais bien, c’est son côté
romantique...
JEANNOT - Gnagnagna “son côté romantiqueuuuh...” Il
n’empêche qu’on n’a pas idée de regarder les étoiles alors même qu’il fait jour !
VIOLETTE - Et alors ? Y’en a bien qui regarde les cuisses de la Raymonde alors même qu’ils sont mariés !
JEANNOT - Rogntudju ! On peut savoir de qui tu parles ?
VIOLETTE - Tu y tiens vraiment ?
JEANNOT - Va donc chercher du vin plutôt ! Tiens va me
remplir ça à la cave je te prie... (Elle sort.) VIOLETTE ! Et
ramène en une autre aussi on ne sait jamais.
MARIE -On ne sait jamais quoi ?
JEANNOT - Ben... euh... on ne sait jamais c’est tout.
MARIE -Des fois que la première bouteille manquerait... de cuisse.
JEANNOT - Oh, ben c’est malin ça tient ! Je t’en prie épargne-moi tes crises d’asthmes !
MARIE -“Tes sarcasmes” ignare !
JEANNOT - Sarcasmes, crise d’asthmes c’est pareil tout ça, c’est maladif.
MARIE -C’est pas la peine que je te demande de mettre la table bien sûr...
JEANNOT - Tu sais bien que j’inverse toujours les couverts...
MARIE -Evidemment...
JEANNOT - Et puis...
MARIE -Et puis quoi ?
JEANNOT - Et puis c’est pas un travail d’homme voilà !
MARIE -Les temps ont changé mon ami, aujourd’hui c’est le partage des tâches tu sais...
JEANNOT - Ben justement, tiens, j’en ai fait une de tache, alors on partage : moi je l’ai faite et toi tu la laves.
MARIE -Tu fais de l’esprit toi maintenant ?
Marie commence à servir la soupe, on frappe.
JEANNOT - Qu’est-ce qu’il lui prend à cette môme ? Elle
frappe pour entrer maintenant ? Mais entre donc bougre d’idiote !
Scène 2
Marie, Jeannot, Benoît, Huguette
Huguette entre timidement suivie de son mari.
HUGUETTE -Excusez-moi, je ne suis pas sûre d’avoir bien entendu : pouvons-nous entrer ?
JEANNOT - Oh boudiou ! Je vous prie de m’excuser : je vous avais pris pour ma fille !
HUGUETTE -Oh ! Regarde Benoît comme monsieur est
courtois. Ce n’est pas toi qui me confondrais avec une jeune fille !
BENOÎT -Ma chérie, j’avoue que non, mais toutefois derrière une porte cela pourrait arriver, peut-être même avec un boy-scout !
HUGUETTE -Oh c’est d’un fin... mais évidemment ce n’est pas avec ton petit cerveau de moineau que tu pourrais avoir deux sous de subtilités !
JEANNOT - Excusez-moi...
BENOÎT -Deux sous de subtilités c’est à voir mais cent sous pour tes robes ça tu sais me les trouver !
JEANNOT - Ahem, excusez-moi...
HUGUETTE -Non mais dis-donc tu les aimes bien mes robes ! Tu ne voudrais quand même pas que je m’habille de chiffons ! Remarque tu aurais moins envie de les soulever peut-être, mes chiffons !
JEANNOT - Excusez-moi...
BENOÎT -Ma chère que ce soit des torchons des serviettes des chiffons ou des robes ça fait bien longtemps que l’idée de vous les soulever m’a passé !
JEANNOT - Excusez-moi...
HUGUETTE -C’est plutôt votre capacité à vous soulever qui vous a passé !
JEANNOT - EXCUSEZ-MOI !
HUGUETTE -Oh pardon ! Nous ne nous sommes même pas
présentés ! Je suis confuse.
MARIE -Pourtant on commence à bien vous connaître...
intimement même...
BENOÎT -Oh, madame, ne la croyez pas, enfin je veux dire, ce sont des enfantillages.
JEANNOT - Oh, vous savez, ça arrive au meilleur hein, prenez le taureau du Léon, huit années de bons et loyaux services, jamais une faiblesse, plus de 300 conquêtes à son actif, un sacré gaillard hein ?
BENOÎT -Ah, effectivement... 300 vous dites ?
JEANNOT - Oui 300 et ben la semaine dernière il a pas voulu de la Florette ma petite dernière !
HUGUETTE -Vous offrez votre fille à un taureau ?
JEANNOT - Qué fille ? Mais non la Florette c’est une génisse, une vache quoi. Bon vous me direz : c’est une limousine et lui préfère les Hollandaises mais quand même c’est vexant, la Florette elle mange plus depuis, elle fait de... comment qu’il a dit le vétérinaire déjà... de l’arménie je crois.
MARIE -De l’a-né-mie.
JEANNOT - Oui, c’est ça de l’anini, c’est vous dire !
BENOÎT -Ah oui je vois et elle est...