Âge d’or et tête de pioche
Personnages :
PAPY GÂTEUX Monsieur Damien, ancien ouvrier, il a fait la guerre d’Algérie en étant soldat. Il est fier d’avoir survécu à un AVC et un arrêt cardiaque
MAMIE DOULEUR Elle a vécu en Algérie étant plus jeune, mais on ne sait rien de son passé. Elle sait manipuler les armes et connaît les explosifs
MÉMÉ COULURE Madame Michelle, femme au foyer durant toute sa vie, elle lit beaucoup et tricote/crochète/fait du point de croix
PÉPÉ CONTINENCE Monsieur Jean-Luc Ancien banquier et député, il est assez aisé et connaît les systèmes bancaires. Il a été lâché par tous ses amis politiciens, ce qui le fait enrager
MONSIEUR ARSÈNE Pensionnaire et coureur de jupon, il fait le mur pour pouvoir aller voir ses conquêtes
L’INFIRMIER Gaëtan, personnage sûr de lui et instruit, il croit tout savoir de ses
pensionnaires et ne les écoute jamais vraiment. Il se définit comme un « accompagnateur de fin de vie »
MARIE-CHANTAL Fille de Pépé Continence, elle ne s’intéresse qu’à l’héritage. Stricte et raide
MARCEL Vieux de l’hospice, meilleur ami de Henri, adore jouer aux cartes et à la pétanque
HENRI Vieux de l’hospice, meilleur ami de Marcel
MAMIE THÉRÈSE Vieille de l’hospice. Elle perd la boule
LA JEUNE Jeune fille venant voir son grand-père et sans la moindre idée de ce à quoi il ressemble
FRÉDÉRIQUE Petite-fille de mamie Thérèse
POLICIERS 1 ET 2 « Starsky et Hutch »
Acte1
Les rideaux s’ouvrent sur un couloir de maison de retraite, sur la droite l’accès au réfectoire et à l’entrée, deux portes d’appartements visibles. Sur la gauche, le couloir continue sur d’autres chambres. On devine la lumière verte d’une sortie de secours immédiatement après la scène côté jardin. Une plante verte en plastique et deux fauteuils, une table de jeux entre les deux, deux tableaux criards sur les murs, deux chaises le long des murs.
Mamie Douleur est assise sur une chaise, elle fait de la broderie. La porte de droite s’ouvre et en sort Papy Gâteux.
Mamie Douleur : Tiens, bonjour Papy Gâteux.
Papy Gâteux : Bonjour Mamie Douleur, bien dormi ?
Mamie Douleur : Pas du tout, et vous ?
Papy Gâteux : Pas du tout.
Mamie Douleur : Donc tout va bien.
Papy Gâteux : Les douleurs habituelles. Et vous, rien de grave ?
Mamie Douleur : J’ai de nouveau mal à l’épaule.
Papy Gâteux : Ah ? Mais vous n’aviez rien hier ?
Mamie Douleur : Oui, tout se remet en place.
Papy Gâteux : Ah ben c’est très bien. Vous nous aviez fait peur à aller mieux.
Mamie Douleur : Oh oui, je dois dire que même moi j’ai été inquiète. Quand ça ne fait plus mal, ça doit être grave.
Papy Gâteux : Allons allons, ne parlez pas ainsi. Tout va bien, puisque vous avez mal !
Mamie Douleur : Oui, encore heureux. Quand je me suis réveillé, vers 23 h 30, j’ai senti que j’avais mal et je me suis dit : « Ouf, la journée commence bien. » Ensuite je me suis levée et j’ai joué au scrabble jusqu’à deux heures du matin, là j’ai fait ma petite sieste, et vers deux heures et demie, je suis allée faire mon petit tour.
Papy Gâteux : Et alors, vous avez bien dormi ?
Mamie Douleur : Vous me l’avez déjà demandé, Papy Gâteux.
Papy Gâteux : Oh pardon. Et alors, vous avez à nouveau mal à l’épaule ?
Mamie Douleur : Vous n’êtes pas très bien aujourd’hui, Papy Gâteux.
Papy Gâteux : Excusez-moi, ça ne fait que deux heures que je suis éveillé, il faut le temps que ça se remette en marche.
Mamie Douleur : Ne vous en faites pas, j’ai l’habitude. Regardez, vous en pensez quoi ?
Papy Gâteux : Oh que c’est joli. « Haut les mains », avec la petite fleur sur le « i ».
Mamie Douleur : Je me suis dit que tant qu’à faire, j’allais en profiter pour avancer. Et les deux autres, déjà de sortie ?
Papy Gâteux : Oh, pensez-vous. Ils sont partis ensemble, vers 4 h 30, pour prendre le premier bus.
Mamie Douleur : Oh la la … Vous croyez qu’ils fricotent ensemble ?
Papy Gâteux : Je crois bien.
Mamie Douleur : Oh la la …
(passe Marcel)
Marcel : Bonjour la compagnie !
Les deux autres : Bonjour monsieur Marcel.
Marcel : Vous n’avez pas vu monsieur Henri ? Je le cherche partout depuis dix minutes.
Mamie Douleur : Il vous attend dans l’entrée.
Marcel : Mais pourquoi dans l’entrée ? On devait jouer aux cartes dans la chambre ! Olala …
(Il sort)
Papy Gâteux : (a Marcel qui est sorti) Dans quelle chambre, la vôtre ou la sienne ?
Mamie Douleur : Laissez, il nous fait le coup chaque jour ou presque. Ils n’arrivent toujours pas à se faire comprendre entre eux.
Papy Gâteux : Je me demande s’ils ne le font pas exprès.
Mamie Douleur : Allons, ils ne seraient pas tordus à ce point.
Papy Gâteux : Mais si, simplement pour ne pas s’ennuyer.
Mamie Douleur : Vous pensez ?
(Pépé Continence et Mémé Coulure entrent à cour)
Pépé Continence : Bonjour la jeunesse, bien dormi ?
Mamie Douleur et Papy Gâteux (ensemble) : Non !
Mémé Coulure : Il faut que j’aille au petit coin.
(Mémé Coulure sort à jardin)
Mamie Douleur : Vous avez gagné combien ?
Pépé Continence : Moins de vingt euros. Ça devient difficile de voler les caddies sans que les gens ne le remarquent. Ils deviennent méfiants, maintenant.
Mamie Douleur : Vous devriez changer d’endroit, c’est plus facile au Leclerc. Au Simply, ce sont des pauvres, ils ont besoin de leur argent.
Pépé Continence : On retournera plutôt piquer les sacs des passagers du train. J’ai le temps de les prendre pendant que Mémé Coulure leur demande gentiment de descendre sa valise trop lourde.
(entre Monsieur Henri)
Monsieur Henri : Bonjour Messieurs dames !
Les trois ensemble : Bonjour Monsieur Henri !
Monsieur Henri : (à Pépé Continence:) Vous monsieur, je ne vous salue pas !
Pépé Continence : Comme d’habitude.
Monsieur Henri : (aux deux autres) Auriez-vous vu passer monsieur Marcel ?
Mamie Douleur : Il vous attend dans le hall d’entrée. Vous n’aviez pas précisé dans quelle chambre vous vous retrouviez.
Monsieur Henri : Décidément, il me fera le coup chaque jour. (ignorant Pépé Continence) Merci madame, au revoir monsieur.
(il sort)
Mamie Douleur : Il vous en veut vraiment.
Pépé Continence : Oui, mon mandat lui est resté en travers de la gorge je crois.
Papy Gâteux : Je suis presque sûr qu’ils le font exprès pour perdre du temps et ne pas s’ennuyer. Presque.
Mamie Douleur : Allons, papy Gâteux… Tous les jours, exprès ?
Papy Gâteux : C’est mieux que d’attendre les visites en regardant la télévision dans la salle communale. Au moins ils bougent.
Pépé Continence : Je suis de son avis. (voulant empêcher de continuer la discussion) Rien de neuf sinon ?
Mamie Douleur : J’ai fait une broderie.
Pépé Continence (regardant la broderie) : Oh, comme c’est joli. Vous nous gâtez, dites donc.
Papy Gâteux : Et alors, vous avez bien dormi ?
Pépé Continence (ignorant l’intervention de Papy Gâteux) : Nous nous retrouvons après le repas, comme d’habitude ?
Papy Gâteux : On n’a pas déjà mangé ?
Mamie Douleur : Papy Gâteux, vous devriez reprendre un café.
Pépé Continence : Bonne idée, surtout que je pourrais tester ma nouvelle pochette.
Mamie Douleur : Oh oui, c’est vrai que vous en avez fabriqué une ! Montrez-la-nous.
(Pépé Continence enlève sa veste. On voit qu’il a une poche avec une perfusion accrochée sur son bras. Il l’enlève...
