Lui : (il regarde des revues dans tous les sens, faisant les cents pas.) Oh…Ah ouais ! C’est bien…Toi, je t’aime et toi aussi. Ah non, toi et toi. Vous m’aimez ? Moi je vous aime toutes. Même toi, la plus moche. Je suis gentil, très gentil. Venez à la maison, on s’amusera. Ici, dans ma pièce préférée, sous les pavés. Venez…Je vis tout seul, je suis libre comme l’air. Je suis tout seul…
Un voix féminine en off : Papa ? (léger temps) Où te caches-tu ?
(L’homme se saisit et dissimule les revues maladroitement sous quelques affaires.)
Lui : (in petto) Enfin, pas tout à fait tout seul, mais presque. Si vous venez, je vous présenterai maman. Chut ! Faute être très gentil avec elle, vu qu’elle n’est pas toujours très gentille avec les autres. (Il crie) Maman ! Oui…Oui ? Je suis ici.
Maman : Où, ici ?
Lui : Là où c’est que j’aime être. Ici…à la cave.
Maman : (toujours en off) J’arrive…
(Il s’assure que les revues ne se voient pas.)
Papa : Coucou.
(Elle arrive et regarde autour d’elle. Puis le fixe intensément.)
Papa : (il répète) Coucou !
Maman : Quoi ? Nous nous sommes vus ce matin, crétin !
Papa : Je sais, mais j’avais encore envie de te dire bonjour.
Maman : (elle lève les yeux au ciel) Alors, encore en train de végéter, pendant que me tape tout le travail !
Papa : Pas du tout. La situation est sous contrôle, suis venu pour tout préparer et me ressourcer avant de commencer la créméronie.
Maman : (en insistant) Cérémonie !
Papa : Oui, c’est ça. La crème des cérémonies…
Maman : Tu as l’air tout excité, qu’est-ce qui se passe ?
Papa : Rien.
Maman : Ne me mens pas, je te connais trop bien.
(Elle semble sceptique. Fouille très rapidement à gauche et à droite et trouve sur les revues mal dissimulées.)
Maman : (elle les montre du doigt) Et ça, qu’est-ce que c’est ?
Papa : (il les protège en se plaçant devant) Je ne sais pas !
Maman : Encore tes cochonneries !
Papa : Pas du tout, c’est mes revues de tatanomie.
Maman : (articulant fort) Anatomie, pauvre bougre.
Papa : Anna Tomie ? Elle, je ne la connais pas !
Maman : Donne-les moi.
Papa : Non, c’est à moi.
Maman : Donne-moi ces magazines ! Donne moi ça, ils te font perdre la tête…enfin, ce qui t’en reste.
Papa : Pas question, tu vas le dire à tout le monde et tout le monde va le savoir et tous vont se moquer de moi.
Maman : Pas de crainte, vu que tu ne connais personne…
Papa : (montrant ses magazines) Si, elles me connaissent.
Maman : Mais bien sûr. Bon, c’est pas tout ça, le temps presse. (Il reste figé) Faut se dépêcher.
Papa : Oui, oui, on se dépêche.
Maman : Attends.
(Elle le regarde intensément.)
Papa : Quoi ?
Maman : Tu m’aimes ?
Papa : Ben...