En cherchant la pervenche

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Antoine et Etienne sont deux artistes qui s’aiment d’un amour passionnel, d’un amour fou. Etienne a vingt-cinq ans, Antoine en a cinquante et il se meurt à petit feu. Que faire quand sa muse, son amant, son amour, son âme, meurt ? Que faire quand on sait que l’on va vivre des décennies encore après sa mort ?

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Liste des personnages (2)

AntoineHomme • Adulte • 300 répliques
Un photographe et philosophe, 50 ans, vétéran de la Seconde Guerre mondiale.
ÉtienneHomme • Adulte • 300 répliques
Un artiste peintre et poète, 25 ans

Décor (2)

La chambre conjugaleUn lit
Le bureauUn bureau, des tableaux, des appareils photos des années 70, des chevalets.

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“Un amour impossible
Copenhague
Comme les temps immobiles
Copenhague
Comme si nous n′étions jamais revenus
De notre paradis perdu”

— Philippe Katerine, Copenhague

Antoine est dans son bureau. Il range un livre dans sa bibliothèque et s’allume une cigarette avant de s’asseoir dans son fauteuil.
Il travaille un moment sur les négatifs de ses photographies, cigarette à la bouche.
Étienne entre au bout de quelques minutes et va s’asseoir sur le bureau.

Antoine — Tu es réveillé ? Enfin.

Étienne — Tu t’es levé tôt.

Antoine — J’ai du travail. 

Étienne — Et moi, alors ?

Antoine — Tu as du temps, toi. Moi, je vieillis.

Étienne — Ah ! Ne joue pas à ce jeu avec moi, Antoine !

Antoine — Ce jeu ?

Étienne avec une voix de vieillard — “Étienne, je suis un vieillard, bla bla bla…”

Antoine — Parce que je suis jeune, peut-être ?

Étienne — Non, jeune, non. Mais pas vieux, arrête… Je ne suis pas amoureux d’un vieux.

Antoine — Ah ! Tu es amoureux, maintenant ?

Étienne — Arrête ! (soudainement effrayé) Pas toi ?

Antoine — Non, je te garde chez moi et je te loge, mais je te déteste. 

Étienne (qui reprend son expression tranquille et taquine) — C’est sûr.

Antoine — C’est évident.

Étienne — Ça se voit.

Antoine — Bien entendu.

Un temps. Antoine s'est concentré sur son travail.

Étienne — Bon.

Antoine — Hm ?

Étienne — On fait quelque chose ?

Antoine — Eh bien, je travaille…

Étienne — Bon, je vais travailler aussi, alors.

Antoine — Vas-y. Je te laisse faire.

Étienne — D'accord. Je le fais.

Un temps. Antoine s'agite, déconcentré.

Antoine — … Bon… Quoi ?

Étienne — Tu veux vraiment travailler toute la journée, aujourd'hui ?

Antoine — Pourquoi pas ?

Étienne — On pourrait sortir. Je ne sais pas… Se promener près du lac.

Antoine — J'ai mal aux jambes.

Étienne — Ah, mais merde ! Tu n'as pas quatre-vingts ans, non plus !

Antoine — C'est que…

Étienne — Quoi ?

Antoine — Rien.

Étienne — Ça te ferait du bien de sortir. Toute la ville va te penser mort, sinon.

Antoine — Pour ce que ça change…

Étienne — Antoine !

Antoine — Oui, oui… Dans la semaine, pas aujourd'hui… Aujourd'hui, je me concentre sur mon montage.

Étienne — Pfff… Comme tu le souhaites. Je reste avec toi, de toute façon.

Antoine — D’accord.

Étienne — Antoine ?

Antoine — Oui ?

Étienne — Je pensais à quelque chose…

Antoine — Dis-moi tout, je t'écoute.

Étienne — Je me disais… Bon, peut-être pas maintenant, mais… Éventuellement…

Antoine — Éventuellement ?

Étienne — Je me disais, comme tu es marié… Tu peux adopter…

Antoine — … Tu n'y penses pas.

Étienne — Je ne sais pas. Je me disais que… Peut-être…
J'en aurais envie, éventuellement…

Antoine — Je ne suis pas contre, mais…

Étienne — Mais… ?

Antoine — Je ne sais pas. Je suis peut-être un peu vieux.

Étienne — Tu as encore du temps devant toi.

Antoine — Oui. Peut-être. 

Étienne — Réfléchis-y, au moins.

Antoine — Je vais y réfléchir.

Étienne — Merci. Mon amour.

Antoine — …

Ils se reconcentrent sur leurs travaux.

Étienne — Ah, j'ai failli oublier. 

Antoine — Oui ?

Étienne — La semaine prochaine, on va au restaurant. Tu t'en rappelles ?

Antoine — Oui. Bien sûr.

Étienne — Super. J'ai hâte.

Antoine reste un moment silencieux à travailler sur la pellicule. Puis, il lève la tête et se tourne vers Étienne.

Antoine — Étienne.

Étienne — Hm ?

Antoine — Je suis malade.

Étienne — Tu veux un médicament ? J'en ai dans la chambre.

Antoine — Étienne…

Étienne — Quoi ?

Antoine — C'est très grave.

Étienne — Qu'est-ce que tu racontes ?

Antoine — Ce sont mes poumons, enfin…

Étienne — Antoine, ce n'est pas drôle.

Antoine prend les mains d'Étienne, le regard grave.

Antoine — C'est incurable, tu sais. 

Étienne — Tu mens.

Antoine — Non. C'est vrai. Je vais en mourir.

Étienne — Pourquoi tu me dis ça ?

Antoine — Pour que tu le saches. Je crois que c'est une assez bonne raison…

Étienne — J'aurais préféré ne rien savoir. J'aurais préféré t'aimer sans le savoir.

Antoine — On aime plus en sachant que les jours nous sont comptés. On remarque qu'on doit profiter.

Étienne — Qu'est-ce qui va se passer ? Concrètement ?

Antoine — Je vais perdre des forces. Je vais m'étouffer dans mon sang, sûrement.

Étienne — C'est…

Antoine — Inspirant.

Étienne — … Terrifiant.

Antoine — Tu n'apprécies pas l’art de la douleur.

Étienne — Peut-être parce qu'il faut savoir qu’elle va finir pour apprécier la souffrance.

Antoine — Tu as raison. Mais tu as tellement tort.
Je t'aime tellement. Pourtant, je sais que mon amour ne s'arrêtera jamais.

Étienne — Quand tu mourras, tu ne m'aimeras plus.

Antoine — Qui te dit cela ?

Étienne — La logique. Tu ne pourras plus m'aimer. Tu ne seras plus là.

Antoine — Mais je t'aimerai toujours. Étienne…

Étienne — Tu ne sais pas. Tu ne peux pas savoir.

Antoine — Qu’importe ! Tu peux bien dire que je t'aimerai toujours, tu pourras faire de mon souvenir ce que tu désires. Je te l'accorde.

Étienne — Ce n'est pas ton souvenir que je veux.

Antoine — C'est assez, non ?

Étienne — Je veux combattre Dieu, et que tu ne meures jamais.

Antoine — Dieu nous avait fait la vie facile. C'est en le combattant qu'on souffre le plus. Tu sais, Étienne, Rousseau a dit que…

Étienne — Au diable, Rousseau.

Antoine — Quoi ?

Étienne — Au diable !...

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